• 101 Couverture dossier

  • PA100

  • PA99

  • PA98

  • photo oser negocier
  • 96
  • 95
  • 94
  • 93
  • principe-actif_92
  • principe-actif_91
  • principe-actif_90
  • principe-actif_89
  • principe-actif_88
  • principe-actif_87
  • principe-actif_86
  • principe-actif_85
  • principe-actif_84
  • principe-actif_83
  • principe-actif_82
  • principe-actif_81
  • principe-actif_80

Sur la finalité des entreprises

le .

... « Traditionnellement, mais aussi aujourd’hui d’une façon encore fort répandue, on pense que l’entreprise est simplement destinée à produire des richesses. En transformant des produits et en les commercialisant, elle en accroît la valeur marchande en même temps qu’elle crée le marché où circulent les nouvelles richesses, qu’elles soient fiduciaires ou matérielles.

... Dans une vision utilitaire de l’entreprise, le patron a fait le choix du combat technique, matériel et commercial, et il trouve dans ce choix sa propre justification. Il n’y aurait rien à ajouter : chacun est libre de se poser comme objet ou comme agent technique et mathématique dans un ensemble qui le dépasse. Il n’y aurait rien à ajouter si les problèmes et les difficultés ne s’accumulaient pas d’une manière souvent intolérable.

... Pour vaincre les obstacles et résoudre les difficultés il ne suffirait pas que le dirigeant d’entreprise adopte une attitude plus sage et moins ambitieuse dans ses projets et ses objectifs. La « sagesse », comme modération dans l’expansion permettrait de diminuer l’angoisse mais sans résoudre les problèmes qui la suscitent. La sérénité est préférable à l’inquiétude mais si les données et les perspectives restent les mêmes, la sagesse et la sérénité redeviennent des outils de la réussite, c’est-à-dire de simples instruments du rendement qui ne résoudront en rien ni les conflits, ni la question du partage des charges et des biens.

Le changement doit être beaucoup plus profond que la simple adoption d’une attitude stoïcienne ou ascétique. Ce changement doit d’abord concerner l’idée même qu’on se fait de l’entreprise et de ses finalités.

... Cette haute finalité est le bonheur même. Il réside dans la satisfaction profonde et permanente de réaliser son Désir et sa vie. Mais cette satisfaction, ce bonheur d’entreprendre resteraient simplement intellectuels s’ils ne reposaient pas sur l’expérience concrète de la jouissance et de la joie.

Il s’agit bien sûr de la joie de créer et de la jouissance d’accomplir un travail ou une tâche ayant un sens. La jouissance n’est plus coupable, dès lors qu’elle est maîtrisée, l’existence n’est plus un fardeau ou un hasard dès lors qu’elle est réfléchie, choisie et structurée.

Cette joie de créer comporte de multiples significations : le sujet personnel (chacun des sujets de l’entreprise) se réjouit de sa propre créativité et par là de l’autonomie fondatrice qu’il se confère à lui-même. Mais il se réjouit aussi de la reconnaissance que lui accordent ses compagnons et ses collaborateurs. Il se réjouit de l’amitié active en même temps que de la
création des biens et des richesses. Il peut aussi se réjouir de sa responsabilité personnelle et de la responsabilité sociale de l’entreprise : elle change la figure du monde et elle se crée des obligations en même temps qu’elle accroît, pour elle et pour ses clients, la jouissance de vivre... »


Robert Misrahi in « Le bonheur d’entreprendre »
Polynôme (extrait)