96C'est à la fois,

Résister, Inventer,

Perdre, Donner,

Relativiser, Recevoir...

 

Mais surtout

c'est peut être simplement

ESPERER...

Si quelqu'un décide de prendre ma suite...

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Faire ses arrangements de famille est un soulagement ; transmettre son entreprise, une jubilation...

Quand on accompagne une famille dans une transmission de patrimoine ; à la sortie de l'Office Notarial, les gens nous font part d'un sentiment de soulagement et c'est bien normal car l'unité familiale a pu être conservée, parfois même raffermie.

Un juriste affuté fait parfaitement l'affaire…

Mais si nous réfléchissons sur une transmission d'entreprise nous ne parlons pas uniquement d'un patrimoine, notion trop réductrice, mais de richesses de plusieurs natures largement imbriquées : financières certes, techniques, technologiques, humaines, etc.

Dans la majorité des cas la vie d'un dirigeant, n'a pas été qu'une sinécure ; que son entreprise soit conséquente ou modeste, il a fallu déployer de l'énergie, prendre des risques, oser, faire  des paris, chasser le doute et parfois rebondir après des échecs ; et cela a pu être accompagné d'un zeste de marginalité dans la vie privée...

Que valait tout cela ? Le sais-je vraiment ? Je vais être fixé. Si quelqu'un accepte de prendre ma suite, c'est que cette vie que j'ai vécue, la façon dont je l'ai abordée, valait le coup  puisque quelqu'un de ma lignée ou pas, valide mon destin par l'acte concret de s'engager sur mes pas ; s'intéresse à ce que j'ai mis du temps à mettre au point, souhaite que je lui transmette les recettes que j'ai pu façonner tout au long de ma route ...

Et que dire donc d'une ferme où  des générations d'aïeuls écrasent d'une obligation morale d'assumer une continuité et de passer le relais à une succession .... même si c'est le contraire qui est affiché dans le discours...

Transmettre une entreprise est affaire de jubilation si cela fonctionne bien ; tout aussi chargée émotionnellement qu'une répartition familiale de biens mais d'une toute autre envergure ; beaucoup plus difficile à réussir. Il faut être pertinent sur plusieurs registres à la fois qui ne sont pas tous liés à la recherche d'équité ou à l'optimisation de droits ...

Les personnes partenaires doivent, certes être au fait des différentes techniques mais aussi suffisamment proches pour partager l'intime et la confidence, savoir puiser dans leur savoir et leur expérience mais aussi leur imagination les procédés adaptés et cela avec une neutralité émotionnelle que les acteurs immergés ne peuvent avoir eux mêmes...

Ai-je transmis l'essentiel ?

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En posant ainsi le vaste sujet de la transmission, voici une anecdote qui s'impose à la narration... Il m'arrive de rencontrer des gens qui me font des confidences sur leur vécu et me disent ceci : « Ca n'a pas été toujours simple mais avec les trucs que « le vieux » m'avait appris j'ai toujours pu m'en sortir »

J'aimerais vraiment que mes enfants un jour puissent penser et confier cette phrase magique, à leur entourage à mon propos.

J'aurais donc transmis, consciemment ou pas des « trucs » sur lesquels ce que j'ai de plus cher au monde a pu s'appuyer, s'inspirer, qui les ont propulsés ou peut être protégés, bref qui auraient contribué à leur épanouissement et à leur réussite quels que soient les chemins qu'ils auraient choisi d'emprunter...

S'agit-il de valeurs de travail, d'honnêteté, de confiance en soi, de tolérance, d'ouverture à l'autre, ou d’autres encore ?  Je ne sais… Je sais juste qu'il s'agit là d'une gratification totale à laquelle aspire chaque parent et j’y suis candidat !

Rencontre de deux volontés

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Depuis la nuit des temps, la raison d’être de tous les organismes vivants est la transmission…

Ce besoin est porté de manière intrinsèque, viscérale, assurant la continuité de l’espèce par la transmission du patrimoine génétique, par des mécanismes archaïques excluant toute réflexion ou conscience. Nous n’échappons pas à cette règle universelle, qui régit la vie des levures comme celle des baleines… Notre condition humaine nous permet toutefois d’espérer nous élever un peu au-dessus de ces basses considérations… ! Ayant conscience de notre présence éphémère, plus le temps passe et plus nous nous préoccupons de transmission. Une vie est-elle tout à fait aboutie  si elle n’a pas pu donner lieu à un passage de relais, sous quelque forme que ce soit ? Le savoir n’est-il utile qu’à la seule condition d’être transmis ? A des descendants comme à des pairs ? En tout un chacun réside plus qu’une volonté, un désir de transmettre ce qu’on a soi-même reçu de bon et d’utile pour construire sa vie et l’orienter, mais aussi l’expérience, les convictions  que l’on s’est forgées soi-même… Si les erreurs commises, les obstacles surmontés, les bonheurs vécus ne sont pas partagés et transmis, à des enfants, à des élèves, ou encore à un repreneur… quel sens donner à toutes ces petites victoires ? Une vie passée à la tête d’une entreprise ou d’une exploitation, indépendamment de sa taille ; une vie consacrée à la développer ou à lutter pour la maintenir à flots, appelle de ses vœux un repreneur. Quelle énergie gaspillée  si elle s’éteint avec nous, faute de successeur capable de la reprendre ou désireux de la reprendre… Car on oublie parfois que la transmission implique la rencontre de deux volontés, celle de donner mais aussi celle de recevoir. Elle implique également un langage commun, un système de valeurs commun, une vision commune… Et exige encore une réappropriation du bien, du savoir, de la culture transmise. Quel intérêt à seriner les mêmes leçons à quelqu’un qui n’en a que faire ? Le message lui paraîtra vide de contenu et de signification. Le sort des cultures et des savoirs ainsi transmis se résumera à tomber dans l’oubli ou pire, à se transformer en croyances, superstitions et tabous interdisant toute réflexion et adaptation. Qui peut prétendre transmettre une vérité incontestable et immuable et exiger des suivants son application à la lettre ? La transmission se faisant dans un contexte, mélange d’histoire personnelle, de valeurs, de craintes et d’affection, la meilleure volonté est une condition nécessaire mais pas toujours suffisante à sa réussite. Celle-ci demande de lâcher-prise sur un sujet, un savoir, un outil de travail que l’on connaît par cœur et que l’on maîtrise, et par conséquent un certain effacement de soi, au profit du dépositaire de l’objet transmis. Et par là-même, peut-être, un tout petit début de disparition …

Envoyer au-delà

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Etymologiquement : transmettre signifie ‘‘envoyer au-delà’’, tout comme le mot tradition vient du latin ‘‘tradere’’ qui veut dire transmettre. La boucle est bouclée ?

Transmettre, c’est résister : en conservant la mémoire, on transmet ce qu’on a reçu.

Transmettre, c’est inventer : débattre et critiquer ce que les autres nous ont transmis pour le  réinventer en le rendant accessible  tous les jours aux plus jeunes.

Transmettre c’est inévitablement perdre, car la transmission est le mouvement permanent de l’humanité qui nous engendre et nous traverse.

Transmettre, c’est donner une valeur qui ne se discute pas, une force de la tradition, pour sortir de l’enfance, de l’ignorance, pour civiliser par cet effet intergénérationnel puissant.

Transmettre, c’est relativiser son narcissisme : tu n’es que le maillon d’une chaîne, un jour tu t’éclipseras et le Monde continuera...

Le déficit de transmission des valeurs universelles crée des civilisations en crise.

Quid tradere ?

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Je transmets mes gènes

Tu transmets ton nom

Il transmet son savoir

Nous transmettons nos valeurs

Vous transmettez vos croyances

Ils transmettent la vie

Transmettre,  « envoyer au-delà »

Au-delà de moi-même

Au-delà de mon parcours

Au-delà de ma génération

Laisser une empreinte… ou pas

Passer le relais, le témoin

Et surtout transmettre autour de moi

Une certaine idée du bonheur

Une certaine idée de la sérénité

La faculté de s’adapter

Pour avancer, faire face, faire bouger

Alors transmettre c’est peut être Tout simplement Espérer

Socrate 2.0

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En ces temps de progrès, où il est de bon ton de rompre avec le passé et la tradition, que peut-on transmettre ?

Oui,  dans un monde, où les moyens de communication ont fait des progrès incommensurables, où le Web 2.0 est devenu une source d’information sans fin et sans fonds, nous sommes passés d’une société de la transmission à une société de la connaissance. Sans rassurer, ni encourager.

Les jeunes ne reconnaissent plus forcément les adultes comme des détenteurs de savoir, de valeurs et de la civilisation.  Ils les considèrent parfois comme inutiles. Ils sont moins motivants qu’une vidéo de YouTube mettant en avant le plaisir plutôt que l’effort.

Face à ce raz-de-marée d’informations, de connaissances, mais aussi de rumeurs, de théories mensongères, il faut maintenir sa conscience éveillée, critiquer et débattre, tel Platon.

En passant d’une société de la transmission à une société de la connaissance, nous devons choisir de devenir des gardiens de la conscience pour nos futures générations. Nous devons réécrire ou inventer nos traditions pour cimenter l’universalité.

Le défi dans ce contexte est d’apprendre à faire le tri, d’éliminer, d’organiser, faire des liens, distinguer le vrai du faux, vérifier et confronter. Plus que les moyens de communication mis en cause, c’est l’usage qui en est fait. Les connaissances et les savoirs nous ont dépassés à un point tel que nous sommes obligés de devenir les gardiens de la civilisation pour pouvoir continuer à transmettre, inventer, créer.

Nous ne transmettons plus des vérités, nous en montrons le chemin sans en cacher les aspérités.  Des Socrate 2.0.